Un des pionniers de l’utilisation de l’acide hyaluronique en gynécologie, le Dr Nicolas Berreni explique à Genesis les raisons de l’engouement récent pour la restauration génitale.
Gynécologue-obstétricien, diplômé en médecine esthétique, fondateur et secrétaire général du GRIRG, attachée de recherche en sciences fondamentales et appliquées à Toulouse, … mais à quoi carburez-vous ?
A la curiosité et à mon envie irrépressible de faire avancer la médecine. Le tout exacerbé par le fait que j’ai eu l’honneur de faire partie de l’équipe qui a mis au point les techniques endoscopiques appliquées à la gynécologie ainsi que leurs diffusions au sein du Centre International de Chirurgie Endoscopique (CICE) à Clermont-Ferrand !
Je vous assure qu’on ne ressort pas indemne d’une telle aventure qui a donné naissance à cette technique chirurgicale révolutionnaire avec des répercussions à d’autres disciplines comme en chirurgie digestive, urologique, orthopédique…
Au regard des résultats extraordinaires de la restauration génitale, j’ai le profond sentiment de revivre une aventure révolutionnaire similaire !
Comment vous êtes-vous intéressé à la reconstruction vulvo-vaginale ?
C’est par le plus grand des hasards que mon aventure sur la restauration vulvo-vaginale a commencé avec l’utilisation de l’acide hyaluronique des laboratoires Vivacy. Leur produit venait d’obtenir un marquage CE en gynécologie en particulier pour l’indication traitement de la sécheresse intime ainsi que pour la reconstruction des grandes lèvres. Conquis par les premiers résultats chez mes patientes, j’ai tout de suite cherché à en savoir plus sur ce produit. C’est tout naturellement que je suis allé à la rencontre du monde de la médecine esthétique et de la chirurgie plastique qui avait déjà une grande expérience de l’utilisation de l’acide hyaluronique. J’y ai découvert d’autres techniques reconstructrices (injections de graisse après liposuccion ou de plasma enrichi en plaquettes et facteurs de croissance, lasers…) et j’ai surtout retrouvé l’importance de la pratique de la dissection anatomique pour comprendre les subtilités des techniques d’injections.
Qu’apporte concrètement la restauration vulvo-génitale ?
Ni plus ni moins, qu’une seconde vie pour toutes les femmes souffrant de troubles uro-vulvovaginaux chez lesquelles nous étions jusqu’à présent dans une véritable impasse thérapeutique ! Les indications sont multiples : lichen scléro atrophique, conséquences vulvo-vaginale après traitements de cancers hormono dépendants comme le cancer du sein après curiethérapie, mais également dans le cas de syndrome génito-urinaire de la ménopause troubles posttraumatiques de l’accouchement par voie basse : cicatrices douloureuse d’épisiotomie ou après exérèse chirurgicale : postnymphoplastie, post-vaginoplastie. Mais la restauration vulvogénitale est bien plus que cela ! Nous savons aujourd’hui que des véritables solutions existent, cela nous permet, à nous médecin, d’être plus à l’aise pour parler de l’intimité des femmes et d’avoir des armes efficaces pour lutter « contre la conspiration du silence » autour des troubles de la sexualité féminine.
Les injections d’acide hyaluronique ne sont donc plus réservées qu’au visage. Quelles en sont les indications en gynécologie ?
L’acide hyaluronique par voie sous-muqueuse est en effet proposé désormais pour le vagin afin de corriger les troubles de la trophicité de la sphère génitale. L’épithélium vaginal retrouve son épaisseur, sa vascularisation, et son aspect qu’il avait chez la femme jeune, avant la ménopause. Ces modifications structurelles vont se traduire en pratique par une meilleure lubrification et une disparition des symptômes en lien avec la sécheresse. Le pH baisse significativement et la flore vaginale se rééquilibre.
Ces injections peuvent être faites au cabinet sous une petite anesthésie locale. La technique est simple mais nécessite toutefois une formation première. L’insuffisance de maîtrise du geste par le praticien est à l’origine des principaux effets indésirables et des insuffisances de résultats. Un recul de 4 ans montre que les injections de cet acide hyaluronique dédié à la gynécologie, diminuent considérablement les problèmes de sécheresse vaginale et leurs conséquences sur les douleurs sexuelles ou dyspareunies d’intromission pour une durée moyenne de 9 à 12 mois. L’acide hyaluronique Desirial est le seul ayant obtenu le marquage CE dans cette indication, avec études cliniques à l’appui.
Pouvez-vous nous expliquer brièvement comment fonctionnent les lasers et les radiofréquences ?
L’utilisation des lasers (CO2 et Er-Yag) et des radiofréquences en restauration vaginale traitent avant tout l’hypotonie de la sphère vaginale, suite à un accouchement ou après la ménopause. En chauffant les tissus de façon ciblée et modérée, ils stimulent la formation de collagène au niveau de la muqueuse vaginale. Ce phénomène provoque une rétraction des tissus avec un resserrement progressif du vagin et un effet tenseur. La chaleur dilate également les vaisseaux, d’où une meilleure lubrification et hydratation locale. Leurs principales indications : incontinences urinaires par impériosité et parfois à l’effort, relâchement vaginal, sécheresse liée à une atrophie de la muqueuse vaginale. Les bénéfices après 2 à 3 séances se maintiennent pendant près de 3 ans.
En tant que secrétaire général, pouvez-vous nous décrire le GRIRG ?
Le GRIRG (Groupe de Recherche et Innovations en Restauration Génitale) est né en 2014, à partir du constat que se développent partout dans le monde de nombreuses techniques chirurgicales et non chirurgicales ayant trait à la reconstruction, restauration ou réjuvénation de la sphère génito-urinaire.
Tous ces savoir-faires étaient individuels, cloisonnés, peu publiés ou au contraire dissimulés avec des bases anatomiques et fonctionnelles incertaines. Le GRIRG fonctionne avec la volonté de recroiser tous ces chemins ouverts dans leurs variétés et leurs connaissances et profiter de cet élan pour créer une société savante unique par sa diversité, son goût de l’innovation, sa réflexion et son décloisonnement professionnel.
L’objectif principal du GRIRG est de participer à la levée de cette chape de plomb qui pèse sur la sphère de l’intime.
Concrètement qu’a fait le GRIRG ? Votre groupe a-t’il réussi à s’imposer dans les domaines de la gynécologie et de l’esthétique ?
Sur le plan des formations, je citerais la mise en place de nôtre diplôme universitaire dédié grâce aux eff orts de notre président le Pr Pierre MARÈS et de la faculté de Médecine de Montpellier Nîmes. Cette formation spécifique à la restauration vulvo-vaginale intitulée : « Médecine et chirurgie reconstructrice et plastique pelvipérinéale » est unique en Europe et connait depuis ses premières heures un énorme succès national et même international attirant toutes les spécialités intéressées. Nous organisons également des symposia dédiés à cette spécialité, notre participation régulière à des congrès nationaux et internationaux comme ceux de l’IMCAS qui regroupent plus de 10000 professionnels chaque année, avec retransmission en direct de dissections anatomique ou interventions spécifiques de la sphère génitale. Nous menons également des travaux multicentriques avec des structures universitaires et privées pour affiner et valider les techniques de manière randomisée et en double aveugle. Nous constatons tous les jours les succès de ces techniques mais nous devons démontrer leur efficacité selon les règles de l’art. Je terminerai en insistant sur notre place importante occupée aujourd’hui dans les congrès internationaux et les partenariats tissés avec d’autres sociétés savantes (Italienne, espagnole, allemande et même chinoise…).
Notre légitimité repose en particulier sur notre savoir-faire historique dans ce domaine qui s’appuie sur les découvertes essentielles de nos ainés telles que l’endoscopie gynécologique et la chirurgie vaginale. Nous jouissons aujourd’hui d’un grand respect de la part des nos confrères internationaux. J’invite mes confrères gynécologues à s’intéresser à cette spécialisation née de la gynécologie, car à mes yeux, nous sommes les mieux placés pour prendre en charge de manière globale et efficace l’intime de nos patientes.
Pour plus d’informations contacter le GRIRG : www.grirg.org
Propos recueillis par Frédéric Pitetti
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts pour cet article.
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