Le THM, un ancien traitement d’avenir
Imaginez une étude épidémiologique qui terrorisa la planète Terre et qui 14 après n’en finit plus de faire ce qu’on appelle pudiquement des « dégâts collatéraux ».
Une étude qui s’est vue maintes et maintes fois retoquée depuis sa parution quant à ses affirmations péremptoires par d’autres études qui, elles, plaident en vain dans le désert. Je veux parler des études KEEPS, E3N, ELITE et autres DOBS…
Une étude qui serait déjà responsable aux USA du décès, entre 2002 et 2011, de 18 000 à 100 000 femmes parce qu’elles lui ont fait confiance avec l’approbation plus ou moins générale de leurs médecins (1).
Une étude que le très pointilleux « NICE », National Institute for Health Care, l’équivalent britannique (2), en beaucoup plus sévère de notre HAS, a revisité il y a quelques mois en émettant des recommandations contredisant la plupart de ses arguments.
Bon, vous avez deviné l’étude dont je parle : elle se nomme bien la WHI (Women Health Initiative Study).
Parmi les morceaux choisis du NICE (Novembre 2015) :
- Le THM doit être adapté selon l’évolution des symptômes
- Après 5 ans, le THM peut être continué en fonction des bouffées de chaleur et après avoir discuté avec la patiente des bénéfices à court terme et à plus long terme
- Par voie cutanée (œstrogènes), le risque de thrombose veineuse n’est pas plus important que celui des femmes non traitées
- Le risque CV du THM n’est pas augmenté si le traitement est débuté avant 60 ans
- Le THM n’augmente en aucune manière l’incidence de la mortalité par accident CV
- Le risque CV n’est pas augmenté ou même réduit si œstrogènes seuls
- Le risque CV n’est pas augmenté ou peu si œstrogènes + progestatifs
- Le THM n’augmente pas le risque de mortalité par cancer du sein
- Le risque de cancer du sein n’augmente pas ou faiblement si œstrogènes seuls
- Le risque peut être augmenté avec un THM EP.
Piochons aussi dans le consensus de l’International Menopause Society (3) qui a réuni 7 Sociétés Savantes internationales – et pas les moindres – en 2012.
Eh oui, il y a 4 ans déjà :
- Le risque de cancer du sein est d’abord associé avec l’addition d’un progestatif aux œstrogènes et lié à la durée d’utilisation. Le risque attribuable au THM est faible et diminue à l’arrêt du traitement
- Le THM est efficace et peut être indiqué dans la prévention des fractures ostéoporotiques chez les femmes à risque avant 60 ans ou dans les dix ans suivant la ménopause
- Le THM n’augmente pas le risque des maladies coronariennes pour les femmes en bonne santé de moins de 60 ans ou dans les dix ans suivant la ménopause.
Alors que se passe-t-il dans notre doux pays ?
Les Autorités de Santé n’ont pas changé leurs recommandations très restrictives depuis la publication princeps de la WHI en 2002. La conséquence est simple : des millions de Françaises restent perdues à la ménopause et vivent des journées et des nuits particulièrement pénibles, augmentent leur risque d’ostéoporose, constatent une dégradation de leur sexualité… consomment des somnifères, des AINS, des anxiolytiques…
Allez la HAS, allez l’ANSM ! Il faut maintenant nous donner de nouvelles recommandations à l’instar de ce que le NICE a fait pour nos voisins buveurs de thé ! Pour le bonheur et la santé de nos patientes.
(1) D’après Pr L’Hermite GUNAIKEIA VOL 19 N°3 ; 2014
(2) Menopause: diagnosis and treatment, Nice guideline,12 nov 2015
www.nice.org.uk/guidance/ng23/resources/menopause-diagnosis-andmanagement-1837330217413
(3) Villiers, M. L. S. Gass, C. J. Haines, J. E. Hall, R. A. Lobo, D. D. Pierroz and M. Rees. Global Consensus Statement on menopause hormone therapy. Maturitas 2013 74(4) 391-2
Article paru dans le Genesis N°188 (février/mars 2016)
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