Péri ménopause, post ménopause…de quoi parle-t-on au juste?
A quels âges moyens surviennent ces événements?
Et comment en fait-on le diagnostic?
Les réponses à ces questions a priori simples mais que nous n’avons pas toujours clairement en tête sont largement développées ici.
Les définitions
Etymologiquement, le terme ménopause vient du Grec mênos, mois et pausis, cessation.
La ménopause se définit par l’arrêt définitif des menstruations résultant de la perte de l’activité folliculaire ovarienne.
La périménopause ou période climatérique englobe la période précédant la ménopause, quand apparaissent les signes cliniques et biologiques annonçant la ménopause et l’année qui suit les dernières règles.
Pour désigner la même période qui précède l’arrêt des règles, le terme « préménopause » est le plus couramment employé par nos patientes et en vulgarisation mais médicalement, il convient d’employer le terme de « périménopause ».
La postménopause ou ménopause confirmée est la période qui suit la périménopause et se poursuit jusqu’à la fin de l’existence.
L’installation de la ménopause se fait en plusieurs phases (figure1).
Il existe 2 types de ménopauses :
- la ménopause naturelle spontanée
- la ménopause artificielle: le plus souvent chirurgicale et plus rarement par irradiations ou chimiothérapie.
Il existe aussi des états ménopausiques transitoires induits par chimiothérapie ou traitements par analogues du LH-RH.
Les âges de la ménopause
Le THM n’est jamais une obligation mais plutôt un choix. La moyenne d’âge de survenue de la ménopause spontanée est assez concordante dans les différentes enquêtes. Cet âge est de 50 ans environ pour les femmes européennes. En fait, cette moyenne arithmétique est le sommet d’une courbe de Gauss qui recouvre une large fourchette : 80% des femmes sont ménopausées entre 45 et 55 ans, environ 10% avant 45 ans et 10% après 55 ans.
L’étude de la Massachusetts Women’s Health Study de MacKINLAY portant sur 2 570 femmes témoigne de cette importante variabilité de l’âge de la ménopause (figure 2).
Qu’appelle-t-on ménopause précoce ?
Avant 40 ans, on peut parler de ménopause précoce et cela concerne 1 à 2 % des femmes.
Peut-on prévoir l’âge de la ménopause naturelle pour une femme considérée ?
Non, tant qu’elle est réglée régulièrement. Il existe cependant des familles à ménopauses précoces et des familles à ménopauses tardives mais ce n’est pas une règle et on peut constater d’importantes différences d’âge de survenue de la ménopause entre deux sœurs.
Quels sont les facteurs qui peuvent intervenir sur l’âge de la ménopause ?
L’âge de la puberté, la parité, le poids n’influencent pas l’âge de la ménopause.
Le tabagisme est le seul facteur pouvant abaisser significativement l’âge de la ménopause. Dans toutes les tranches d’âge, le pourcentage de femmes ménopausées est plus élevé chez les fumeuses. Dans la Massachusetts Women’s Health Study, il existe ainsi une différence de 1,8 année entre l’âge moyen de la ménopause chez les fumeuses et les non fumeuses.
Après une prise de pilule au long cours, mettant les ovaires au repos pendant des années voire 10 ou 20 années, l’âge de la ménopause sera-t-il retardé ?
Non, la prise antérieure de la pilule estroprogestative, même de très longue durée ne va pas retarder l’âge de la ménopause.
L’espérance de vie
Si l’âge de la ménopause est remarquablement fixe, l’espérance de vie d’une Française de 50 ans augmente régulièrement et actuellement elle va vivre pratiquement autant de temps en ménopause qu’en période d’activité ovarienne. Une Française de 50 ans sur quatre va atteindre 90 ans.
Faire le diagnostic de ménopause
Le diagnostic de ménopause est un diagnostic clinique et rétrospectif. Il n’est pas possible d’en indiquer une date précise mais plutôt une période à quelques mois près. En effet, les frontières entre la périménopause et la ménopause sont floues et mouvantes.
Quels sont les signes de la périménopause ?
L’entrée en périménopause se caractérise habituellement par 2 signes : les irrégularités menstruelles et l’apparition des premières bouffées de chaleur.
Combien de temps va durer la périménopause ?
On peut répondre de façon statistique pour une population mais il n’est pas possible de prévoir la durée de cette période d’anarchie hormonale et très inconfortable pour une patiente considérée (figure 3). Entre le premier dérèglement et l’arrêt des cycles, il va s’écouler en moyenne 2 à 4 années, parfois moins, parfois plus, «on navigue cliniquement et à vue»… Il ne faut pas se laisser impressionner par un premier dérèglement ou des dosages évocateurs car ensuite les cycles peuvent redevenir réguliers pendant plusieurs mois avant de se dérégler à nouveau.
Faut-il faire des dosages en périménopause ou pour confirmer la ménopause ?
Non, les dosages hormonaux ne sont pas indispensables au diagnostic de ménopause. Pire, ils peuvent induire en erreur le praticien en posant un diagnostic prématuré et en incitant à une instauration trop précoce d’un THM, source de symptômes congestifs de surdosage aboutissant à un arrêt voire un rejet définitif du traitement.
En périménopause, les dosages hormonaux plasmatiques sont très fluctuants et le taux d’estradiol fait des «montagnes russes». D’autre part, si l’élévation de la FSH est le premier signe biologique de la périménopause, cette élévation peut précéder les signes cliniques de plusieurs années.
Les dosages peuvent cependant avoir un intérêt dans certains cas particuliers, comme en cas d’hystérectomie ou lors du passage de la pilule estroprogestative au THS. Deux dosages hormonaux plasmatiques suffisent alors FSH et estradiol.
Les bouffées de chaleur.
Dans la grande majorité des cas, les troubles vasomoteurs qui concernent 3 femmes sur 4 ne sont pas un symptôme de ménopause confirmée car ils vont débuter dès la périménopause (figure 4).
L’aménorrhée
C’est l’aménorrhée définitive qui va confirmer le diagnostic de ménopause. Dans la quasi-totalité des cas, l’aménorrhée ne s’installe pas de façon brutale mais est précédée d’une longue période (2 à 4 années en moyenne) d’irrégularités menstruelles. En dehors de la grossesse, la ménopause est la première cause d’aménorrhée après 40 ans.
On considère qu’il faut 12 mois d’aménorrhée spontanée avant de pouvoir parler de ménopause. On peut aussi poser le diagnostic de ménopause de façon fiable et plus confortable pour nos patientes après 3 mois d’aménorrhée malgré une séquence progestative prescrite 10, 15 ou 20 jours par mois 3 mois de suite.
Cependant, il faut savoir que même à distance des dernières règles, une reviviscence de l’activité ovarienne est possible et dans ce cas, le retour des saignements est associé le plus souvent aux phénomènes congestifs abdominopelviens et/ou aux mastodynies qui accompagnaient habituellement les menstruations.
Cependant, au delà de 12 mois d’aménorrhée, tout saignement doit être considéré comme une métrorragie post-ménopausique et déclencher des investigations.
Une lésion organique est souvent retrouvée: hyperplasie endométriale, polype, myome sous-muqueux, adénomyose, carcinome endométrial.
Faire le diagnostic différentiel
Un certain nombre de troubles peuvent entraîner des signes identiques à ceux observés en période climatérique. Cependant, dans la très grande majorité des cas, l’ensemble du tableau clinique permet d’établir le bon diagnostic.
L’aménorrhée
En dehors de la grossesse, la ménopause est la première cause d’aménorrhée après 40 ans. Avant 40 ans, une aménorrhée peut être due à une ménopause précoce mais d’autres causes doivent être recherchées : anorexie mentale, hyperprolactinémie avec galactorrhée, dystrophie ovarienne, aménorrhée psychogène. Dans ces cas, l’existence de troubles vasomoteurs est rare. Le dosage des gonadotrophines permet de faire le diagnostic de ménopause. Si ce dosage est normal, une enquête doit déterminer la cause de l’aménorrhée secondaire.
Les troubles vasomoteurs
D’autres causes peuvent entraîner des symptômes pouvant être interprétés comme des bouffées de chaleur : l’hyperthyroïdie, le phéochromocytome, les carcinoïdes, le diabète, la tuberculose, les infections chroniques, la spasmophilie. Aucune de ces causes n’entraîne d’autres symptômes identiques à ceux observés en période climatérique. Cette absence d’autres symptômes climatériques doit faire rechercher une autre étiologie.
Les métrorragies
S’il existe un allongement des cycles et une diminution de la durée et de l’abondance des règles, on peut penser que l’approche de la ménopause en est responsable et il n’y a pas lieu de faire des investigations.
Si les règles sont plus fréquentes, plus longues, plus abondantes et/ou qu’il existe des métrorragies intercurrentes, une exploration endométriale doit être faite.
Alain Tamborini – Service de chirurgie cancérologique, gynécologique et du sein ; Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris
Cas particulier: comment faire le diagnostic de ménopause chez une femme sous pilule et comment passer de la pilule estroprogestative au THM ?
Ce problème se pose de plus en plus souvent depuis que l’on prescrit ou plutôt que l’on poursuit fréquemment la contraception orale au-delà de 40 ans chez une femme en bonne santé, avec une tension normale, un bilan lipidique normal, sans de facteur de risque thromboembolique et non fumeuse.
A l’âge présumé de la ménopause ou lorsque le risque de grossesse est très faible :
On peut arrêter la pilule et prescrire un progestatif du 16e au 25e jour du cycle puis 10 jours par mois.
S’il n’y a pas de règles après 3 séquences progestatives et que le bilan hormonal (FSH élevée et 17 ß estradiol bas) plaide en faveur de la ménopause, on peut poser le diagnostic de ménopause et instaurer un THM si on le juge opportun.
Si des règles surviennent après une ou plusieurs séquences progestatives, on peut, soit reprendre la pilule, soit poursuivre l’administration cyclique d’un progestatif, comme dans le cas commun de la périménopause.
Si l’on souhaite passer directement de la pilule au THM :
On peut demander un bilan hormonal (FSH et 17 ß estradiol) la veille de la reprise de la pilule et distinguer alors 3 cas de figure :
- FSH basse et 17 ß estradiol témoignant d’une sécrétion estrogénique résiduelle : il n’y a pas ménopause,
- FSH élevée et 17 ß estradiol témoignant d’une sécrétion estrogénique résiduelle : la patiente est en périménopause,
- FSH élevée et 17 ß estradiol bas : il y a probablement ménopause et l’on peut envisager le passage de la pilule au THM.
Cette attitude sous-entend que l’on dispose de dosages hormonaux plasmatiques fiables et l’on sait que cette fiabilité est difficile à assurer pour les taux faibles de 17 ß estradiol. Ce schéma simple n’est donc pas infaillible et peut être pris en défaut, notamment en ce qui concerne le dernier cas de figure.
Article paru dans le Genesis N°181 (octobre/novembre 2014)
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