Une évolution assez lente depuis 20 ans
Il n’y a pas eu de révolution chirurgicale en gynécologie ces dernières années. La chirurgie minimale invasive se développe de plus en plus dans la pathologie bénigne.
Dans le domaine de l’oncologie mammaire, les techniques d’oncoplastie pour l’exérèse des tumeurs se sont généralisées de même que la technique du ganglion sentinelle. Les indications de mammectomie restent stables mais les reconstructions sont de plus en plus proposées aux patientes et on s’oriente probablement vers une généralisation de ces techniques de reconstructions en immédiat lors de l’intervention d’exérèse du sein. Les interventions chirurgicales quelles qu’elles soient sont effectuées dès que possible en fonction de leur nature et de l’état physiologique du patient en chirurgie ambulatoire. La médecine cancérologique a elle aussi fait de nombreux progrès grâce à une amélioration des techniques de radiothérapie, de la généralisation des équipements de radiochirurgie pour traiter les métastases. Les chimiothérapies sont données à meilleur escient dans le cancer du sein et ce, grâce aux tests génomiques qui permettent de mieux cerner les femmes à risque de récidive bénéficiant réellement de ces traitements.
La chirurgie coelioscopique cancérologique prend de l’essor mais reste hélas encore l’exception :
A peine 20% des cancers gynécologiques sont traités par voie coelio vaginale en France, la laparotomie restant le traitement standard. Il est probable que la chirurgie robotique qui a vu le jour ces 10 dernières années dans notre spécialité augmentera le ratio de chirurgie laparoscopique mais son coût et la longueur de la formation sont un frein majeur à son développement. Le poids des contraintes administratives s’est décuplé ces dernières années et ce, même au sein de l’hospitalisation privée, la HAS étant de plus en plus exigeante vis-à-vis des praticiens avant de donner l’agrément aux établissements.
Une spécialisation de plus en plus prégnante
La chirurgie cancérologique se spécialise de plus en plus et les praticiens vont tendre à devenir dans le futur des spécialistes d’organe.
Pour l’instant, les accréditations pour exercer la chirurgie cancérologique sont attribuées à des établissements. A titre d’exemple, le seuil pour opérer un cancer du sein est fixé à 50 procédures dans l’année, tout praticien confondu au sein du même établissement. C’est notoirement insuffisant au vu des dernières publications démontrant l’impact direct de l’expérience et du volume d’activité du chirurgien sur l’amélioration de la survie et la diminution du risque de récidive. Les seuils seront relevés dans le futur et probablement qu’ils seront donnés à titre individuel.
Un bon nombre d’hôpitaux, de cliniques et de gynécologues obstétriciens perdront dans le futur l’autorisation d’exercer la chirurgie cancérologique gynécologique pour le plus grand bien des patientes.
Une sur-judiciarisation de la médecine
Les patientes ne supportent pas l’aléa thérapeutique et c’est encore plus vrai dans la chirurgie cancérologique, soumise aux aléas de la chirurgie mais aussi à ceux du cancer.
La seule réponse à apporter à cette tendance est de s’hyperspécialiser et de travailler dans des structures pluridisciplinaires ou les décisions seront partagées au sein de la RCP (réunion de concertation pluridisciplinaire) ce qui ne dégage absolument pas le chirurgien de ses obligations.
Un espoir ? les jeunes générations
Ces dernières années n’ont pas donné envie aux jeunes générations de rejoindre la médecine libérale. J’espère pour le futur que nos dirigeants comprendront enfin la nécessité de 2 pôles de santé forts et complémentaires, l’hôpital public et l’hospitalisation privée. A titre d’exemple et dans notre spécialité, 50% des cancers sont pris en charge dans le privé.
Éric SEBBAN,
Chirurgien cancérologue et gynécologue, Responsable département chirurgie gynécologique et mammaire, Clinique Hartmann Neuilly, Hôpital Américain de Paris. Cofondateur Institut Rafael.
19 commentaires