Le THM est le plus souvent un traitement de longue durée suivi plusieurs années. Afin d’obtenir une bonne observance, il importe que le traitement soit bien instauré, efficace, bien toléré, bien compris et bien surveillé.
Il existe quelques notions simples et principes de base qu’il est souhaitable de connaître et de respecter si l’on veut espérer une bonne observance. Plusieurs de ces principes sont d’ailleurs valables en médecine, en général, mais revêtent une importance particulière lors de la consultation de ménopause, souvent chronophage et qui demande un investissement important de la part du praticien.
Accorder du temps a la première consultation – Écouter
C’est au cours de la première consultation que va s’instaurer une bonne relation médecin-patiente basée sur le dialogue et la confiance. Si le premier contact n’est pas bon, il risque de ne pas y en avoir de second. Une bonne écoute permet de recenser plaintes et desiderata, de distinguer problèmes médicaux et personnels, d’apprécier la personnalité de la patiente, sa motivation, ses préjugés, ses craintes vis-à-vis du THM.
Tout cela demande du temps: pour cette première consultation, une demi-heure nous semble indispensable et justifiée, même pour un praticien rôdé à la gestion de l’hormonothérapie substitutive. Le temps passé à écouter et expliquer lors de la première consultation rendra plus facile et allégera probablement les consultations ultérieures avec une patiente apaisée et confiante.
Informer – Expliquer – Éduquer
Selon le code de déontologie, nous devons à nos patientes une «information loyale, claire et appropriée» sur les soins que nous proposons (article 35) et «le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherchée dans tous les cas» (article 36). L’information de la patiente est la condition préalable de son consentement, conséquence qu’elle tire de cette information sur l’intérêt, les modalités, les inconvénients voire les risques des traitements qu’on peut lui proposer.
Le praticien doit s’apprêter à répondre inlassablement aux mêmes questions et objections. Ses explications et ses réponses doivent être claires, franches et rassurantes.
La lecture conseillée de brochures ou documents, souvent édités par les laboratoires pharmaceutiques, peut utilement étayer, relayer le discours du praticien.
L’AFEM (Association Française pour l’Etude de la Ménopause) édite aussi un document d’information régulièrement mis à jour et destiné à être remis aux patientes ; on peut le trouver sur le site de l’AFEM : menopauseafem.com. Ces documents peuvent représenter un appoint, un adjuvant aux explications du praticien mais ne sauraient s’y substituer, l’information devant être personnalisée et intelligible par chacune.
La prescription d’un THM ne nous exonère pas de notre mission d’information : 10 minutes d’explications en fin de consultation pour plusieurs années de traitement, ce n’est pas trop.
Les informations concernent aussi la ménopause, ses troubles, ses conséquences, la sexualité, l’intérêt d’une surveillance et d’examens de dépistage régulier. Il faut accorder une attention et une importance particulières aux problèmes de poids et de silhouette qui préoccupe toutes les femmes. La prescription d’un THM n’exonère pas le praticien des conseils d’hygiène de vie et alimentaires destinés à corriger les erreurs et les excès alimentaires, assurer la ration calcique et lutter contre la sédentarité par la pratique d’une activité physique régulière.
Ne jamais imposer un THM
Le THM n’est jamais une obligation mais plutôt un choix, une opportunité qui est offerte aux femmes qui le désirent ou en ont besoin. Si la patiente est réticente, mieux vaut s’abstenir et différer le moment d’instaurer le THM en laissant mûrir sa réflexion. Un traitement imposé est un traitement qui ne sera pas suivi. Mieux vaut convaincre que contraindre.
En cas de doute de la part de la patiente et/ou du praticien sur l’opportunité d’un THM, on peut toujours le prescrire à titre de «test thérapeutique» sur 3 mois et refaire le point au terme de cette première prescription.
Impliquer la patiente
Il est souhaitable d’impliquer la patiente dans les décisions thérapeutiques et de tenir compte, chaque fois que cela est médicalement possible, de ses desiderata pour une voie d’administration ou le retour ou non des règles, par exemple.
Plus un THM correspondra aux vœux d’une patiente, meilleure sera l’observance.
Personnaliser la prescription pour un THM “sur mesure” – Employer des posologies estrogéniques modérées
Il n’y a pas de THM «standard» : aucun protocole thérapeutique, aucune voie d’administration, aucun dosage ne peut prétendre résoudre tous les problèmes, de toutes les ménopauses, chez toutes les femmes. Nous avons la chance de bénéficier d’un vaste arsenal thérapeutique, sachons y puiser à bon escient dans l’intérêt de nos patientes.
A la ménopause, antécédents, symptômes, facteurs de risque, terrain et desiderata sont considérablement différents d’une femme à l’autre. D’autre part, les traitements hormonaux substitutifs font appel à des estrogènes naturels dont la biodisponibilité varie sensiblement en fonction de la patiente. Enfin, la réceptivité, les réactions et la tolérance aux traitements varient aussi selon les utilisatrices. La conjonction de tous ces facteurs va constituer une multitude de cas différents, auxquels va se trouver confronté le praticien qui va être amené fréquemment à aménager, à personnaliser ses prescriptions, pour aboutir à un THM “sur mesure”. C’est au traitement de s’adapter à la patiente et pas à la patiente de s’adapter au traitement.
Dans la grande majorité des cas, un THM à posologie estrogénique modérée ( 1mg de 17 bêta estradiol par jour pour la voie orale, 0,75 mg pour les gels percutanés et 0,025 mg pour les systèmes transdermiques ou patchs) permet de supprimer les troubles vasomoteurs et préserver le capital osseux avec une bonne tolérance clinique.
Prescrire un THM bien toléré : «pas trop tôt, pas trop fort»
Une bonne tolérance doit être la première qualité, avant l’efficacité, que l’on demande à un THM. Un traitement mal toléré, avec incident, est un traitement qui ne convient pas à une patiente considérée et qui sera abandonné. Il doit être réaménagé.
Une bonne tolérance est indispensable pour une bonne observance de longue durée. Pas question de payer des avantages par des inconvénients.
Ne pas commencer le THM trop tôt quand persistent encore des sécrétions estrogéniques résiduelles qui peuvent s’additionner, se téléscoper avec les prescriptions et aboutir à des effets secondaires de surdosage et à un abandon souvent définitif.
Rester à la posologie minimale efficace qui est le plus souvent une posologie modérée voire une très faible dose, surtout à distance de la ménopause.
Prévenir qu’il peut y avoir une période d’adaptation et des incidents – Rester disponible
Des incidents sont toujours possibles avec toutes les formules thérapeutiques. La patiente doit être prévenue de l’éventualité de ces incidents qui surviennent habituellement lors des premiers cycles et vont conduire à une adaptation, une personnalisation de la prescription.
Il faut rester disponible au téléphone car la gestion de ces incidents ne nécessite pas toujours une nouvelle consultation.
En cas d’incident, toujours s’assurer d’abord de la bonne observance du THM.
Aucune décision concernant le THM n’est irréversible
Un THM peut toujours être modifié, suspendu ou repris. Une patiente doit savoir qu’elle peut toujours revenir sur une décision: la porte du THM ne lui est pas définitivement fermée si elle refuse un traitement un jour et à l’inverse, elle ne doit pas se sentir engagée pour de nombreuses années si elle l’accepte. Une période d’essai est toujours possible.
Chaque année réevaluer la pertinence et les modalités du THM – Il n’y a pas de durée limite «couperet» a l’emploi d’un THM
On peut, chaque année, suspendre le traitement pendant un mois, sans autre inconvénient que la réapparition éventuelle des bouffées de chaleur. Si les symptômes redeviennent gênants, on pourra reprendre le traitement si on le juge opportun et avec l’agrément de la patiente.
On peut aussi réduire progressivement les doses et/ou la durée d’administration du traitement au cours du mois afin d’obtenir une réduction progressive évitant ainsi un sevrage brutal.
Il n’y a pas de durée limite, « couperet », fixée arbitrairement et qui s’appliquerait à toutes les femmes quels que soit l’âge de leur ménopause, leurs symptômes, leurs facteurs de risque et aussi leurs desiderata. Un THM peut donc être poursuivi tant que persistent des troubles climatériques gênants et qui altèrent la qualité de vie, chez une femme informée et volontaire. Or, les bouffées de chaleur, qui s’accompagnent souvent de sueurs nocturnes et d’insomnie, touchent 75% des femmes, persistent plus de 5 années dans la moitié des cas et même plus de 10 ans chez une femme sur 4.
Surveiller – Dépister
Qu’un THM soit instauré ou non, il est indispensable d’effectuer des examens de dépistage à un âge où la pathologie gynécologique et mammaire est particulièrement fréquente. La patiente doit avoir conscience de l’intérêt d’une surveillance médicale afin d’y adhérer.
L’auteur déclare ne pas avoir de conflit d’intérêt concernant les données publiées dans cet article
Alain Tamborini – Service de chirurgie cancérologique, gynécologique et du sein, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris
Article paru dans le Genesis N°180 (septembre 2014)
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