Une nouvelle espèce est née : «l’Homo Connecticus»
Déverser sa vie sur Facebook, collectionner à l’infini les «faux amis», chater jusqu’à l’épuisement pour ne rien dire… nous voici scotchés en permanence à nos écrans tactiles : c’est l’ère de l’ «Homo Connecticus». Il s’agit d’un mutant récent de l’espèce Homo, variante de l’Homo Sapiens. Cette nouvelle espèce n’envisage pas de vivre débranchée et entend vivre sans limite l’aventure numérique. Déferlante du «Quantified Self» qui permet de suivre ses constantes de santé !
Bracelets qui mesurent vos constantes physiques ou votre temps d’exposition au soleil, balances qui affichent l’évolution de votre poids sur votre téléphone, brosses à dents qui vous disent ou frotter plus, vêtements qui mesurent la température de bébé ou votre propre rythme cardiaque, capteurs de sommeil qui vous disent si vous « avez bien dormi », fourchette connectée qui vous empêche de manger trop, pilulier qui vous dit par SMS de prendre vos médicaments, tensiomètre relié à votre téléphone -version numérique du vieil holter-, patch connecté géolocalisant votre parent Alzheimer, tatouage détectant votre température corporelle, lentilles de contact détectant le glucose de vos larmes (ou à infrarouges pour voir dans le noir), dents connectées pour suivre par Bluetooth vos «habitudes buccales», veste à se procurer des câlins à distance…
Déjà 100 000 d’applications santé et cela ne fait que commencer.
Il faut bien dire que la majorité des applications proposées ne font que de se copier entre elles, ne servent pas à grand chose et sont vendues à des gens qui n’en ont pas besoin. D’ailleurs la majorité d’entre elles n’auront qu’une existence très éphémère et sont ou seront des «flops» commerciaux. Mais, n’en doutez pas, cette gadgetisation apparente n’empêchera pas la naissance de la véritable révolution en marche : celle des applications que nous, médecins, allons prescrire dans un futur proche : applications de suivi, de diagnostic… Par exemple déjà le Cue® qui se propose de détecter et de vous donner les résultats par Bluetooth sur votre smartphone (dosage sérique) de la LH, testostérone (!) CRP, la vit D ou la présence de virus grippaux (nasal). Ou la Body Cap® (normande !) qui, avalée, renseigne sur la température corporelle en post opératoire. Ou encore ce SMARTT e-Patch®, timbre transdermique programmé par le médecin qui permet, grâce à un système électronique embarqué, d’administrer de façon contrôlée jusqu’à sept médicaments.
Un sondage de l’Institut Odoxa* (à lire absolument) auprès des médecins révèle en janvier 2015 que 81% d’entre nous estiment que « la santé connectée est une opportunité pour la qualité de soins » et que nous sommes 91% à juger qu’elle est «une opportunité pour améliorer la prévention» des maladies chez les patients. Tandis que les Home Tests commençaient doucement il y a 40 ans de changer notre façon de faire notre métier de gynécologue (HCG, LH..), les applications santé vont confirmer très rapidement la possibilité d’obtenir un certain nombre de vraies infos santé auprès de nos patients. Et bien que de nombreux problèmes persistent (techniques, remboursement, secret médical…) ces applications feront bientôt partie de nos outils quotidiens, n’en doutez plus. Nos patientes, les «garantes» incontestables de la santé familiale ne s’y tromperont pas.
Et nous, gynécologues par exemple, que dirions-nous d’être informés de façon simple sur leur HCG, LH, FSH, E2, test HPV, test Chlamydia… ?
Alors Bienvenue à la Santé Connectée, mais alors please… seulement au service de «l’Homo Connecticus Intelligent» !
Article paru dans le Genesis N°184 (mai 2015)
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