L’amélioration de l’efficacité des techniques d’AMP repose sur l’optimisation des différentes étapes : vérification de l’état clinique de la femme, nombre d’ovocytes obtenus par stimulation ovarienne, ponction folliculaire, travail du laboratoire et procédure du transfert embryonnaire
L’optimisation des résultats en Assistance Médicale à la Procréation (AMP) vise à la naissance d’un enfant vivant en bonne sante, après technique d’AMP. Nous nous limiterons ici aux techniques de fécondation in-vitro (FIV) plus ou moins micro injection intracytoplasmique des spermatozoïdes (ICSI) qui constituent la prise en charge ultime de nos patientes en AMP. Les inséminations intra-utérines seront traitées dans un chapitre à part, tout comme l’impact des techniques biologiques sur les résultats en FIV +/- ICSI. La FIV +/- ICSI comprend l’évaluation clinique des deux membres du couple, la stimulation ovarienne en vue d’une réponse multifolliculaire, la ponction folliculaire et le transfert embryonnaire secondaire au développement embryonnaire. Nous allons donc étudier successivement ces différentes étapes dans la prise en charge, et s’interroger sur l’optimisation de celles-ci.
I / L’ÉVALUATION CLINIQUE DES DEUX MEMBRES DU COUPLE
Après avoir rencontre les deux membres du couple en consultation, nous pouvons évaluer le terrain sur lequel sera menée la FIV +/- ICSI et étudier les éléments cliniques et biologiques qui peuvent contribuer à la réussite ou à l’échec de l’AMP.
1) L’ÂGE FÉMININ ET MASCULIN
L’âge féminin impacte les résultats de la FIV+/- ICSI via la réserve ovarienne. Il est bien connu qu’au fur et à mesure de l’avancée de l’âge féminin, la réserve ovarienne, c’est-a-dire le nombre de follicules mobilisables lors d’une stimulation ovarienne, diminue pour devenir nulle au moment de la ménopause. Cependant des femmes peuvent être en insuffisance ovarienne plus précocement (1% avant 40 ans et 1/1000 avant 30 ans).
La réussite d’une Assistance Médicale à la Procréation dépend donc de la réserve ovarienne, mais aussi de l’âge. En effet, une stimulation ovarienne menée chez une femme jeune avec une réserve ovarienne diminuée peut laisser des chances de grossesse non négligeables, alors qu’une stimulation ovarienne conduite chez une femme plus âgée, au-delà de 37 ou 38 ans, avec une réserve ovarienne faible laisse peu de chance à une grossesse, dans la mesure ou non seulement le nombre d’ovocytes récupérés est faible mais leur qualité, dépendant de l’âge féminin, est inévitablement altérée.
Il est donc souhaitable de prendre en charge les patientes le plus tôt possible pour l’Assistance Médicale à la Procréation. En effet, la FIV +/- ICSI permet de maintenir des taux de grossesse d’environ 20-25% par transfert jusqu’à un âge féminin de 37 ans, mais ceux-ci s’effondre pour atteindre 6-10% à 42 ans. Il faudra donc se poser la question d’une prise en charge en FIV +/- ICSI dans le cadre d’une infertilité inexpliquée au-delà de 40 ans puisque les taux de grossesse obtenue en FIV +/- ICSI a cet âge seront peu différents par rapport à la fécondabilité naturelle ou au résultat obtenu en insémination intra-utérine.
L’âge masculin peut impacter également sur les chances de grossesse en AMP via l’évolutivité de la grossesse (fausses-couches spontanées), en particulier si l’homme est âge de plus de 40 voire 45 ans. Par contre, il ne semble pas exister d’impact de l’âge de l’homme sur les taux de fécondation ou d’évolution embryonnaire in-vitro.
Rappelons que l’évaluation de la réserve ovarienne se fait au 2ème – 3ème jour du cycle, par les dosages hormonaux, FSH, Œstradiol et hormone anti-Müllerienne (AMH, non remboursée par la sécurité sociale à ce jour) ou par le compte échographique des follicules antraux qui permet de déterminer le nombre de follicules prêts pour la croissance folliculaire (follicules mesures entre 2 et 9 mm).
2) LE POIDS
L’excès de poids féminin (IMC > 25-30) impacte les résultats de l’AMP. En effet, la dose de gonadotrophines nécessaire pour obtenir une réponse folliculaire, le nombre d’ovocytes récupères et les chances d’implantation sont impactes par l’excès de poids ou l’obésité. De plus, la survenue d’une grossesse chez une patiente en surpoids ou obèse expose aux accidents gravidiques. On recherchera donc avant toute prise en charge un amaigrissement des femmes en excès de poids ou obèses.
3) LE TABAC ET LES AUTRES DROGUES
L’existence d’un tabagisme féminin impacte non seulement sur la réserve ovarienne mais également sur les chances d’implantation. Il est donc conseille, lors d’une prise en charge en AMP, de diminuer au maximum l’intoxication tabagique chez la femme et chez l’homme, car le tabac peut impacter sur la qualité et le nombre d’ovocytes récupérés mais également sur les chances d’implantation (via la qualité embryonnaire et la vascularisation utérine). Chez l’homme, le tabac a un effet néfaste sur la mobilité des spermatozoïdes et les chances de fécondation. En ce qui concerne les autres drogues, cannabis surtout, il semble que son effet sur la fertilité du couple soit moins importante.
4) L’UTÉRUS
Le but de la prise en charge en Assistance Médicale à la procréation est l’obtention d’une grossesse et donc d’une implantation embryonnaire après transfert embryonnaire. Il est donc absolument indispensable d’évaluer la cavité utérine et l’endomètre avant le transfert embryonnaire. Cette évaluation peut être faite soit lors d’une hystérosalpingographie, soit par hystéroscopie diagnostique après une échographie pelvienne, de façon à diagnostiquer toute anomalie intra-cavitaire (synéchies, fibrome, polype ou malformation) qui pourraient avoir un impact sur l’implantation des embryons.
Des études scientifiques sont en cours pour évaluer la qualité endométriale via des biopsies (richesse ou la déplétion en cellules « Natural Killer », protéomique, …).
De plus, l’échographie pelvienne permettra de détecter la présence ou non d’une anomalie tubaire à type d’hydrosalpinx. On sait que cette pathologie correspond à la rétention intra-tubaire d’un liquide inflammatoire qui perturbe les secrétions utérines. L’ablation de l’hydrosalpinx, avant une tentative d’AMP concourt à améliorer les résultats.
II / LA STIMULATION OVARIENNE
Il n’est pas a ce jour montre qu’un protocole spécifique de stimulation ovarienne donne des résultats meilleurs qu’un autre. En effet, le protocole long agoniste de la GnRH a été le premier utilise et a donné satisfaction. L’arrivée, dans les années 2000, des antagonistes de la GnRH en protocole court a permis, après une première phase d’apprentissage de ce protocole, d’obtenir des résultats totalement équivalents. De même, l’utilisation de l’une ou l’autre des gonadotrophines commercialisées pour la stimulation ovarienne, que ce soit l’HMG, l’association de FSH et LH ou l’utilisation de FSH urinaire ou recombinante, voire de FSH biosimilaire, donne des résultats totalement équivalents et ce quel que soit le mode de fonctionnement ovarien.
La commercialisation de la Corifollitropine α, FSH a action retard couvrant les sept premiers jours de la stimulation, n’a pas permis d’améliorer les résultats observes avec les autres gonadotrophines. En ce qui concerne les patientes dites « faibles répondeuses » c’est-a-dire ayant une insuffisance ovarienne débutante, il n’existe pas a ce jour de protocole meilleur qu’un autre, puisque l’utilisation pour certaines équipes de protocole long agoniste, de protocole court agoniste avec effet flare-up ou de protocole antagoniste donne les mêmes résultats. Nous avons mené une étude, après échec d’un protocole long agoniste, comparant de façon prospective le protocole court flare-up agoniste avec un protocole court antagoniste et les résultats, en terme de grossesse et de récupération ovocytaire, ont été parfaitement identiques entre ces deux protocoles.
Le taux plasmatique d’œstradiol, observe le jour de l’injection d’HCG, peut avoir un effet négatif sur les chances d’implantation. En effet, toute stimulation ovarienne va entraîner une avance de maturation endometriale, qui sera d’autant plus importante que le taux d’œstradiol sera élevé. Il est donc conseille à ce moment-la, soit :
➢ D’utiliser un protocole de type Mild-Stimulation qui à pour effet de stimuler moins fortement dans le but d’obtenir 7 à 10 ovocytes au maximum, limitant ainsi le risque d’avance de maturation endométriale excessive, d’hyperstimulation ovarienne, et améliorant peut-être la qualité ovocytaire puis embryonnaire comme l’ont montre les études de Baart.
➢ D’envisager la congélation de tous les ovocytes prélevés (freeze all). Ce thème sera traite dans l’un des chapitres de cette revue. Ceci a pour intérêt d’éviter tout risque d’hyperstimulation ovarienne, dont on sait qu’elle peut être grave et dangereuse chez certaines patientes, et de pouvoir transférer les embryons congelés puis décongelés lors d’un cycle substitue, naturel ou stimule faiblement, dans de meilleures conditions au niveau de la réceptivité endométriale. Il a bien été montre par des abaques que le nombre idéal d’ovocytes récupérés pour obtenir les meilleurs taux de grossesse se situait entre 10 et 15 ou 10 et 20 maximum, et qu’au-delà de 20 les taux de grossesse avaient plutôt tendance à diminuer.
De plus, une stimulation ovarienne excessive peut entraîner, en fin de phase folliculaire, l’élévation prématurée de la progestérone plasmatique. Cette élévation prématurée crée un endomètre sécrétoire en fin de phase folliculaire et avance donc la fenêtre d’implantation, ce qui a un effet négatif sur l’implantation embryonnaire. Ainsi, la constatation d’une élévation de la progestérone supérieure a 1,5 ou 2,25 ng/ml avant le déclenchement doit conduire à la congélation ovocytaire ou embryonnaire et au transfert diffère. Cette élévation, proportionnelle à la réponse folliculaire, est donc un bon argument pour une stimulation de moindre intensité.
III / LE TRANSFERT EMBRYONNAIRE
Le transfert embryonnaire constitue l’une des phases les plus importantes de la réussite d’une FIV +/- ICSI. En effet elle peut être, soit la phase de réussite de la tentative, soit la phase de mise en péril de l’ensemble du travail qui a été fait précédemment, aussi bien au cours de la stimulation ovarienne que lors du travail du laboratoire. Ce transfert embryonnaire nécessite donc de la patience, une ambiance apaisée et une femme la plus détendue possible. Ce transfert embryonnaire est réalise à l’aide d’un cathéter dont nous ne pouvons pas dire aujourd’hui lequel est le meilleur (probablement pour chacun le cathéter dont on a le plus l’habitude). L’endroit du dépôt des embryons doit se faire dans la partie supérieure de la cavité utérine, à quelques millimètres du fond utérin. Ce transfert doit être le plus atraumatique possible et il ne doit pas exister si possible sur le cathéter de fragments endométriaux ou de sang, ce qui témoignerait d’un transfert traumatique.
La réalisation de ce transfert sous échographie a été évaluée par de très nombreuses équipes.
Les méta-analyses retrouvent un léger bénéfice à l’échoguidage. Néanmoins, dans des équipes expérimentées, les résultats semblent tout à fait comparables que le transfert ait été effectué sous échographie ou non. Nous pensons que l’expérience de l’opérateur, l’habitude du cathéter utilise et la patience mise dans ce transfert embryonnaire sont des éléments beaucoup plus importants que l’echoguidage. Par contre, celui-ci peut avoir un intérêt pour l’apprentissage de nos plus jeunes collègues. En ce qui concerne le nombre d’embryons à transférer, la tendance actuelle concourt a transférer un nombre minimum d’embryons, de façon à éviter la survenue d’une grossesse multiple, gémellaire ou triple. Le transfert mono-embryonnaire peut s’appliquer chez des femmes jeunes, lors des premières tentatives, à condition d’obtenir un « top-embryon » après la phase de culture in-vitro. Ce transfert entraîne des taux de grossesse tout à fait intéressants mais néanmoins inférieurs de l’ordre de 2 a 5% par rapport a un transfert bi-embryonnaire. Le taux de grossesse gémellaire après transfert mono-embryonnaire est de l’ordre de 3 a 5% alors qu’il est de 15 a 20% après un transfert de deux « top-embryon ». Cependant, les taux de grossesse cumulée montrent bien que le transfert mono-embryonnaire associe a un transfert d’embryons congelés donne des résultats totalement équivalents au transfert de deux embryons initialement en diminuant par la même le taux de grossesse multiple. Donc, on privilégiera le transfert mono-embryonnaire chez des femmes de moins de 35 ans, lors de la première ou deuxième tentative, a condition d’obtenir un « top-embryon ». Faut-il transférer les embryons a J2-J3 ou J5-J6 c’est-a-dire au stade blastocyste ? Actuellement, il n’y a pas de preuve formelle qu’un transfert au stade blastocyste puisse donner des résultats très supérieurs a un transfert au stade J2-J3. Nous pensons qu’un transfert a J3 (après activation du génome embryonnaire) d’un « top-embryon » renseigne aussi bien qu’un transfert au stade blastocyste sur la qualité embryonnaire. Néanmoins, le transfert au stade blastocyste nous permet (impose) de faire un transfert unique alors que quelquefois nous sommes tentes de transférer un a deux embryons au stade J3.
La supplémentation de la phase lutéale passe, quel que soit le protocole utilise, par la prescription de progestérone micronisée par voie vaginale au départ puis par voie orale. La dose est entre 400 et 600 mg/jour pour une durée d’au moins 15 jours, jusqu’au résultat du β-hCG. Il n’a pas été montre que l’adjonction d’hCG et/ou d’œstradiol à la progestérone améliorait les chances de grossesse.
Enfin, à ce jour, après transfert embryonnaire, il n’a pas été montre qu’un traitement adjuvant par aspirine, héparine, donneur de NO ou tout autre produit (corticoïdes) pouvait augmenter les taux d’implantation de ces femmes prises en charge en FIV +/- ICSI.
IV / EN CONCLUSION
L’amélioration de la prise en charge en Assistance Médicale à la Procréation passe par l’analyse des différentes étapes afin de rendre celle-ci la plus efficiente possible. On privilégiera évidemment l’arrêt du tabac, la normalisation du poids, la bonne exploration de la cavité utérine et de la région pelvienne avant de prendre en charge ces femmes. En ce qui concerne la stimulation ovarienne, un nombre raisonnable d’ovocytes obtenus, sans élévation importante de l’œstradiol, ni élévation précoce de la Progestérone sera recherchée. Le travail du Laboratoire sera optimise afin d’obtenir le meilleur rendement en terme d’embryons, leur meilleure qualité (« top-embryon ») et si possible l’obtention d’un stade blastocyste qui dénote quand même d’une évolution in-vitro jusqu’à J5-J6 du développement.
Enfin, insistons sur l’importance du transfert embryonnaire, période cruciale pouvant remettre en cause l’ensemble des procédures qui ont été appliquées précédemment. Ce transfert embryonnaire devra être fait dans des conditions de calme, de patience et de détente de la femme. On privilégiera, lorsqu’il existe des « top-embryons », le transfert mono-embryonnaire et la supplémentation de la phase lutéale sera faite par de la progestérone micronisée, car a ce jour aucun autre traitement adjuvant n’a montre son efficacité.
Les références de cet article sont disponibles sur Pubmed ou bien directement auprès de l’auteur.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts pour cet article.
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