Oui la chirurgie a encore une place dans l’AMP en 2017 : pour traiter les dysplasies du vagin et du col, pour corriger les anomalies de l’utérus, pour traiter les anomalies tubaires et traiter les kystes ovariens.
D’après les données de l’Agence de Biomédecine, le taux standardise d’accouchements cumule en France obtenu par FIV (issus de transferts d’embryons frais ou congelés, rapporte au nombre de ponctions) est de 22% et le taux d’accouchement par insémination (moyenne des laboratoires) de 11,0% [10,4%-11,5%] 1.
Si ces résultats sont un indéniable succès, ils ne doivent pas faire oublier qu’ils concernent des patientes qui ont au prealable souvent bénéficie d’une prise en charge chirurgicale dans le but d’optimiser les chances de grossesses obtenues par l’AMP. Aujourd’hui le centre d’AMP attend de la part du chirurgien une collaboration active définie au cours d’une discussion multidisciplinaire centrée sur l’interet de la patiente.
Le sujet aborde ici se limite à la chirurgie gynécologique dans le cadre de l’AMP mais on peut également citer d’autres specialites chirurgicales qui interviennent parfois avant ou au cours de la procédure d’AMP : chirurgie du cancer pelvien ou mammaire (preservation de la fertilite), chirurgie bariatrique (reduction de la comorbidite) et pour le conjoint, chirurgie urologique (cure de varicocele et prélèvement de spermatozoides). Dans ce contexte la chirurgie gynecologique intervient potentiellement sur l’ensemble des pathologies de l’appareil génital feminin :
I / CHIRURGIE DE LA VULVE, DU VAGIN ET DU COL UTÉRIN
Les lésions dysplasiques de la vulve, du vagin et du col utérin nécessitent une vaporisation par laser ou une conisation à l’anse diathermique dont les conséquences en termes de fertilité doivent être réduites au maximum et les interventions inutiles évitées. La pathologie des glandes vestibulaires et les condylomatoses vulvo-vaginales extensives sont prises en charge avant le début du parcours AMP. Les malformations vaginales qui empêchent les rapports sexuels ou un accès au col utérin lors de l’examen gynécologique doivent également être traitées (imperforations hyménales, diaphragme vaginal).
II / CHIRURGIE UTÉRINE
L’évaluation préalable de l’integrite de la cavité utérine par hystéroscopie diagnostique est devenue une étape indispensable de la prise en charge en AMP2. Cet examen est réalisé grâce à des optiques de petit calibre (2,7 mm) en dehors du bloc opératoire et sans anesthésie générale. La chirurgie hystéroscopie permet par la suite le traitement des polypes, des fibromes à composante sous muqueuse (G0, G1, G2 de la classification FIGO 2011, taille < 5cm) qui déforment la cavité, des cloisons utérines, des synéchies, des isthmocèles et de l’hypertrophie polypoïde de l’endomètre. L’utilisation d’énergie électrique bipolaire ou plus recemment d’énergie mécanique en hysteroscopie opératoire à pour objectif de limiter les complications, notamment le risque de synechies post-operatoires3. Le traitement des myomes de taille > 5 cm ou dont la distance de sécurité avec la sereuse est < 5mm peuvent être retires par voie abdominale par coelioscopie ou par laparotomie.
La chirurgie des fibromes qui n’ont pas de repercussions sur la cavite uterine doit plutot être évitée en raison du risque de complications postopératoires (adherences, hemorragies, fragilisation utérine) et de l’absence de benefice demontre en termes d’amelioration de la fertilite4. L’instillation d’acide hyaluronique dans la cavite uterine est recommandée après myomectomie, section de septum ou traitement des synechies3. 6-8 semaines après la chirurgie, un controle de la cavite uterine par hysteroscopie diagnostique est recommandé.
III / CHIRURGIE TUBAIRE
L’évaluation de la perméabilité tubaire est actuellement réalisée par hystérosalpingographie (méthode de référence) ou échographie avec produit de contraste (HyCoSy) 5. La fertiloscopie est une méthode mini-invasive qui permet d’effectuer par culdoscopie une épreuve au bleu en meme temps qu’un drilling ovarien en cas d’OPK resistant au traitement médical. Il n’y a plus de place actuellement pour la cœlioscopie « diagnostique » avant AMP. La place de la chirurgie tubaire chez les patientes infertiles reste discutée puisque on ne dispose pas aujourd’hui d’études comparatives entre FIV et chirurgie. L’âge de la patiente, l’ancienneté de l’infertilité, les facteurs d’infertilité associes a la pathologie tubaire et le choix de la patiente sont déterminants dans la discussion au cas par cas6. Il est actuellement admis qu’une salpingectomie doit être réalisée avant FIV en cas d’hydrosalpinx volumineux visible en echographie7. En cas de risque opératoire particulier (risque adhérentiel sévère, comorbidité) l’obturation tubaire proximale par voie hystéroscopique (méthode EssureR) constitue une alternative quand on veut éviter la cœlioscopie mais le taux de succès en terme de grossesse évolutive est inférieur a la salpingectomie8.
IV / CHIRURGIE DE L’OVAIRE
Pour les patientes infertiles, une attention particulière est de rigueur en cas de chirurgie de l’ovaire. Un bilan de réserve ovarienne par échographie et dosage de l’AMH permet de préciser l’information pré-opératoire attendue par la patiente. L’IRM peut être d’un apport significatif pour préciser le geste chirurgical à réaliser en cas de doute à l’échographie. La chirurgie est réalisée par cœlioscopie de façon méticuleuse en limitant l’utilisation de la coagulation électrique. Le champ opératoire doit être propre et exsangue en fin d’intervention. L’utilisation d’acide hyaluronique est recommandée pour réduire le risque adherentiel3. Les kystes paratubaires volumineux, les kystes épithéliaux bénins, les tératomes matures peuvent être traites le plus souvent par kystectomie avant la ponction FIV. En cours de stimulation le traitement chirurgical s’impose parfois en cas de forte suspicion de torsion d’annexe. Ce geste doit s’efforcer d’être conservateur et réalise avec prudence en raison du risque hemorragique particulier9.
V / CHIRURGIE DE L’OVAIRE
En cas d’endométriose et de désir de grossesse, l’AMP est le traitement de choix en particulier en cas d’atteinte tubaire ou de facteur masculin associe. En cas d’atteinte péritonéale pour les stades ASRM I/II, le traitement complet des lésions par cœlioscopie avant AMP pourrait améliorer les résultats en termes de grossesse mais ceci n’est pas complètement démontré.
En cas d’endométriome ovarien > 3cm, il n’existe pas de preuve que la chirurgie améliore les résultats avant AMP. Cependant une kystectomie peut être proposée pour améliorer l’accessibilité de l’ovaire lors de la ponction ou le syndrome douloureux éventuel tout en prenant soin dans ce contexte d’éviter les interventions itératives (atteinte de la reserve ovarienne).
Par ailleurs l’intérêt de la chirurgie en cas de nodules d’endométriose profonde avant AMP n’a pas été demontre10.
CONCLUSION
Alors la chirurgie a-t-elle encore une place en cas de prise en charge par AMP en 2017 ?
Oui, oui et oui : par hystéroscopie pour améliorer l’état de la cavité utérine, par laparoscopie pour permettre la réalisation d’une ponction ovocytaire dans de bonnes conditions, en urgence pour traiter une complication éventuelle en lien ou non avec la stimulation.
Bien entendu tout doit être mis en œuvre pour que la sanction chirurgicale lorsqu’elle s’avère nécessaire soit réalisée avec tact et mesure, le plus souvent dans le cadre d’une équipe entrainée et après concertation et information, pour un bénéfice optimal de la patiente.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts pour cet article
1. www.agence-biomedecine.fr/Evaluations
2. Intérêt de l’hystéroscopie diagnostique en infertilité et AMP. J.M. MAYENGA, M. BRZAKOWSKI, F. LAROUSSERIE, N. CASTAING, J. BELAISCH-ALLART. CNGOF 2013 Mise à jour en gynécologie et obstétrique.
3. Prevention of Adhésions in Gynecological Surgery: The 2016 Experts Recommendations on Adhesion Prophylaxis. De Wilde, Gynecol Obstet (Sunnyvale) 2017, 7:2 DOI: 10.4172/2161-0932.1000428
4. The Management of Uterine Fibroids in Women With Otherwise Unexplained Infertility. SOGC CLINICAL PRACTICE GUIDELINE. 321, March 2015. www.jogc. com/article/S1701-2163(15)30318-2/pdf
5. Assessment of Fallopian Tube Fimbria Patency With 4-Dimensional Hysterosalpingo- Contrast Sonography in Infertile Women. Wang W. J Ultrasound Med. 2017 May 24. doi: 10.1002/jum.14244.
6. Surgery for tubal infertility. Chua SJ. Cochrane Database Syst Rev. 2017 Jan 23;1:CD006415. doi: 10.1002/14651858.CD006415
7. Hydrosalpinx et AMP. J.-M. ANTOINE. Mises à jour en Gynécologie Médicale – CNGOF Volume 2007.
8. Hysteroscopic proximal tubal occlusion versus laparoscopic salpingectomy as a treatment for hydrosalpinges prior to IVF or ICSI: an RCT. Dreyer K and coll. Hum Reprod. 2016 Sep; 31(9):2005-16. doi: 10.1093/humrep/ dew050.
9. Les tumeurs de l’ovaire présumées bénigne. CNGOF 2013. Recommandations pour la pratique clinique; CNGOF 2013.
10. ESHRE guideline: management of women with endometriosis. Dunselman GA and coll. Hum Reprod. 2014 Mar;29(3):400- 1 2 . d o i : 1 0 . 1 0 9 3 /humrep/det457.
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