L’échographie endo-vaginale est l’examen de choix pour reconnaître le caractère bénin ou malin d’une tumeur ovarienne : 10 règles simples facilitent l’interprétation des images échographiques.
■ Introduction : le cancer de l’ovaire
En Allemagne, une femme sur 72 développe un cancer de l’ovaire (1). L’âge moyen au moment du diagnostic est de 69 ans, mais la fréquence augmente jusqu’à l’âge de 85 ans (1). En France, le nombre de nouveaux cas de cancer de l´ovaire se situe aux alentours de 4600 cas par an. En comparaison, le cancer du sein concerne environ 54 000 nouveaux cas par an (2).
Histologiquement, la plupart (90 %) des cancers ovariens sont des adénocarcinomes (1, 2, 3). On rencontre plus fréquemment chez les femmes jeunes et les enfants des formes plus rares comme les tumeurs germinales. Le taux de survie relatif sur cinq ans est de 41 % en Allemagne (1).
Le vieillissement constitue le risque majeur du cancer de l’ovaire (1). D’autres facteurs de risques sont la nulliparité, l’infertilité et les cancers héréditaires comme les mutations BRCA1, BRCA2, et Lynch II (3). Le traitement hormonal après la ménopause ainsi que l’endométriose, augmentent le risque d’un cancer ovarien. Par contre, le risque du cancer de l’ovaire diminue quand le nombre de grossesses augmente, lorsque la femme allaite ou après l’utilisation de la pilule contraceptive et chez les femmes ayant subi une stérilisation ou une hystérectomie (1, 2, 3).
Le « traitement de choix » pour le cancer de l’ovaire consiste en une chirurgie radicale avec une chimiothérapie adjuvante et/ou néo-adjuvante (3,10).
■ Diagnostic
1. L’échographie
L’objectif du diagnostic est d’éviter une opération inutile, d’identifier un processus malin et de mettre en place un traitement oncologique adéquat. En Allemagne, le taux d’ovariectomies pour des kystes fonctionnels est de 4 000 à 5 000 cas par an. Ceci inclut 21,08 % des opérations avec annexectomie (4). Dans le diagnostic du cancer de l’ovaire, l’échographie endo-vaginale continue à être la technique de choix. Elle constitue aussi la méthode la plus sensible comparée aux antigènes tumoraux, l´IRM et la tomodensitométrie. Son coût représente un grand avantage par rapport aux autres méthodes de diagnostic. L’échographie est une technique non-invasive qui n’expose pas la patiente aux radiations et qui est largement acceptée par les patientes (5).
Les résultats sont fortement liés à l’expérience de l’échographiste. Dans le but d’homogénéiser et de faciliter le diagnostic échographique, Timmerman, et al. ont établi « des règles simples » pour l’échographie endo-vaginale (6).
En 2008, ces auteurs du groupe IOTA (International Ovarian Tumor Analysis), ont publié des « règles simples » de l’évaluation endo-vaginale du kyste ovarien.
Une publication de 2016 par ce groupe précise les données à long terme de ces règles simples. En les appliquant, on obtient une sensibilité et une spécificité très élevées (7).
5 règles pour «malignité»
- tumeur solide irrégulière
- présence d’un épanchement péritonéal
- présence d’au moins quatre végétations
- tumeur irrégulière multi-cloisonnée solide dont un des diamètres est supérieur à 10 cm
- score colorimétrique fort.
5 règles pour «bénignité»
- kyste uniloculaire
- présence de composantes solides dont le plus grand diamètre est inférieur à 7 mm
- cône d’ombre
- masse multiloculaire lisse avec un diamètre maximal inférieur à 100 mm
- absence de flux en doppler couleur.
En utilisant les règles de Timmerman, la distinction entre un kyste bénin ou une tumeur maligne est simplifiée. Prenons quelques exemples :
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2. Le diagnostic plus élaboré : l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pelvienne
L’IRM pelvienne est un examen de seconde intention. Les indications pour cet examen sont limitées. Une IRM se justifie uniquement dans le cas d’une exploration plus élaborée des masses annexielles complexes/indéterminées ou d’une masse kystique pure uniloculaire > 7cm. Le but de l’examen est de diagnostiquer une lésion bénigne ne nécessitant pas d’exploration chirurgicale (8). Quand le kyste demande une exploration plus poussée, un examen avec IRM permet de poser plus précisément l’indication opératoire. Par exemple, un kyste fonctionnel nécessite un traitement médicamenteux. Un blastome bénin nécessite une exploration coelioscopique. Une image peut également présenter une tumeur avec une grande probabilité de malignité. Dans ce cas, il est nécessaire de pratiquer une laparotomie.
■ Le dépistage du cancer de l´ovaire
La plupart des tumeurs de l’ovaire ne sont diagnostiquées qu’à un stade avancé. Actuellement, il n´existe pas de dépistage du cancer de l´ovaire. Selon Jacobs, et al, le dépistage échographique combiné à la détermination de l’antigène tumoral CA125 pourrait toutefois permettre de diagnostiquer un cancer de l’ovaire à un stade plus précoce de son évolution (9). Les examens (une prise de sang et une échographie endo-vaginale) sont des examens simples et bien acceptés par les patientes. Dans cette étude randomisée, ils montrent qu’en combinant ces deux examens, on peut réduire le nombre d’interventions chirurgicales pour des résultats faux-positifs par rapport à une échographie seule, ce qui permet ainsi de réduire la mortalité (9).
■ Conclusion
Le diagnostic échographique d’un kyste ovarien permet de différencier un kyste fonctionnel d‘un blastome. Une analyse précise peut éviter une intervention inutile ou identifier un malignome qui exigerait un traitement oncologique. L’examen de premier choix du diagnostic du kyste ovarien est l’échographie endo-vaginale. Grâce aux « règles simples » de Timmerman, l’analyse est simplifiée pour l’échographiste. C’est seulement dans le cas où le kyste est complexe à évaluer échographiquement ou si le kyste uniloculaire a un diamètre de plus de 7 cm que le diagnostic doit être complété par une IRM. Un dépistage combinant l’échographie endo-vaginale et la recherche de l’antigène tumoral CA125 permet un diagnostic précoce du cancer de l’ovaire. Cependant, nous ne disposons pas de données à long terme concernant le dépistage du cancer de l’ovaire.
Delphine Gallant, Médecin interne du département de gynécologie et d’obstétrique, Université de Bonn, Allemagne
René Druckmann, Professeur de gynécologie obstétrique, président de la Societé européenne de gynécologie-obstétrique de langues française et allemande
Walther Kuhn, Professeur de gynécologie et d’obstétrique, directeur exécutif du département de gynécologie et d’obstétrique, Université de Bonn, Allemagne
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt pour cet article.
RÉFÉRENCES
1. Robert Koch Institut (2015). Krebs in Deutschland, Eierstöcke 3.18. Consulté le 10 aout 2016 de http://www.krebsdaten.de/Krebs/DE/Content/Publikationen/ Krebs_in_Deutschland/kid_2015/kid_2015_c56_eierstoecke.pdf?__blob=publicationFile
2. Institut Curie. Cancer de l’ovaire, qui est concerné ? (2015). Consulté le 10.08.2016 de http://curie.fr/fondation/cancerovaire-qui-est-concerne
3. Carlson, K.J. Screening for ovarian cancer. Dans: UpToDate, Post, TW (Ed), UpToDate,Waltham, MA, 2016. Consulté le 10.08.2016.
4. Epidemiologisches Krebsregister NRW gGmbH. BQS Report (2006). Consulté le 10.08.2016 de http://www.krebsregister.nrw.de/fileadmin/user_upload/dokumente/ veroeffentlichungen/Report_2010/EKR_Report_2010_Internet.pdf
5. S3-Leitlinien (2013). Therapie und Nachsorge maligner Ovarialtumoren.
6. Timmerman, D., Testa, A.C., Bourne, T. et al, Simple ultrasound-based rules for the diagnosis of ovarian cancer. Ultrasound Obstet Gynecol. 2008;31:681–690.
7. Timmerman, D., Van Calster B, Testa A.C., et al, Predicting the risk of malignancy in adnexal masses based on the Simple Rules from the International Ovarian Tumor Analysis group. Am J Obstet Gynecol. 2016 Apr;214(4):424-37.
8. J. de Laveaucoupet: masses annexielles apport de l’IRM. DU imagerie de la femme 2010
9. Jacobs, I.J., Menon, U., Ryan, A., et al, Ovarian cancer screening and mortality in the UK Collaborative Trial of Ovarian Cancer Screening (UKCTOCS): a randomised controlled trial. Lancet. 2016 Mar 5;387(10022):945-56.
10. Wright, A., Bohlke, K, Armstrong, D.K., et al, Neoadjuvant Chemotherapy for Newly Diagnosed, Advanced Ovarian Cancer: Society of Gynecologic Oncology and American Society of Clinical Oncology Clinical Practice Guideline, Journal of Clinical Oncology, 2016 Aug.
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